Ce dimanche de Pâques, la cathédrale Saint-Jean-Baptiste a célébré la Résurrection du Christ. Une magnifique procession a réuni deux cortèges : les femmes, portant la statue de la Vierge Marie, et les hommes, celle du Christ ressuscité.
Puis dans un geste symbolique fort, les deux statues se sont inclinées l’une vers l’autre.
La messe solennelle qui a suivi a rassemblé une assemblée nombreuse, dans une atmosphère de foi et de joie.

Retrouvez ci-dessous l'homélie de Mgr Scherrer, ainsi que quelques images.
" Frères et Sœurs, mes amis,
La nouvelle est si stupéfiante, si bouleversante, si inattendue que Pierre et Jean se lancent dans une course folle, alertées par le témoignage de Marie-Madeleine qui, la première, a trouvé le tombeau vide. Arrivés sur les lieux, les deux apôtres font l’un après l’autre le constat que les linges sont en place, mais que le corps a disparu. Pierre, entré le premier, ne fait que regarder, intrigué, sans que l’événement apparemment ne bouleverse sa foi. C’est alors qu’entre le disciple bien-aimé : « Il vit, et il crut ». On peut être le premier en responsabilité, sans pour autant être le premier en intelligence du cœur, en clairvoyance spirituelle. Le regard de Jean n’est pas le même que celui de Pierre. C’est véritablement un regard de foi qui voit au-delà des apparences. Avant même de recourir aux Écritures, Jean a su saisir la profondeur du mystère pascal par la seule force de l’amour.
Mes amis, c’est à nous que le Seigneur confie la mission de relayer cette joyeuse espérance. Car c’est Pâques pour nous encore aujourd’hui ! Le Christ ressuscité sort vivant du tombeau ! La mort qui semblait avoir le dernier mot est vaincue. Elle n’est plus un trou noir au terme de nos routes. Le Seigneur l’a transformée dans la puissance de son amour. Elle n’est plus la fin qui clôture notre existence. Elle est une naissance au Jour de Dieu. Pâques est un printemps de lumière et de joie ! Mais Pâques n’est pas dans les rêveries de quelques utopistes. C’est un monde nouveau que Dieu veut faire surgir avec nous, maintenant. Avec le Christ ressuscité, nous avons ce pouvoir de rendre ce monde meilleur, de lui donner du sens et de la vie. Comment ? C’est l’apôtre saint Jean qui nous en livre la réponse : « Nous savons que nous sommes passés de la mort à la vie, écrit-il, lorsque nous aimons nos frères. Celui qui n’aime pas demeure dans la mort ». Seul l’amour triomphe de la mort, et c’est en entrant dans cette dynamique de l’amour que nous pouvons déjà vivre en ressuscités.
Peut-être sommes-nous de ceux qui attendent des preuves de la résurrection pour y adhérer avec plus de conviction. Mais ceux qui voudraient filmer au caméscope le Ressuscité jaillissant du tombeau risquent d’attendre longtemps et d’être déçus. Seule la foi en effet peut nous faire dire : « Christ est ressuscité ». Notre foi en revanche s’appuie sur des signes et des témoignages tangibles :
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Il y a d’abord le témoignage des Écritures : l’ancien Testament, en plusieurs passages, a prophétisé la venue du Messie ; il a parlé par avance de ses souffrances, de sa mort et de sa résurrection. L’apôtre Pierre, le jour de la Pentecôte, nous offrira un bel exemple de cette prédication chrétienne qui relie l’ancien Testament à la lumière du nouveau.
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Il y a le témoignage de Jésus lui-même : à trois reprises, tandis qu’il faisait route vers Jérusalem, le Seigneur avait annoncé́ à ses apôtres l’imminence de sa passion et de sa résurrection. Il les avait annoncées comme nécessaires. Il le dira aux deux disciples pérégrinant vers Emmaüs : « Ne fallait-il pas que le Christ souffrit sa passion pour entrer dans sa gloire ? »
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Il y a le témoignage des disciples qui affirment avoir vu le Seigneur après sa résurrection. On les a soupçonnés d’hallucination : mais les disciples ne se sont pas laissé déstabiliser par les moqueries, par les menaces. Face à la mort elle-même, ils sont restés fermes dans leur témoignage de foi. On les accusés de manipulation : mais de leur témoignage de foi, ils n’ont tiré́ aucun bénéfice personnel. On les a crus en quête de consolation : mais s’ils avaient eu besoin d’un réconfort personnel, il leur aurait suffi d’adhérer à un club des nostalgiques du prophète Jésus. Non, en réalité quelque chose s’est passé qui a bouleversé leur propre vie devenue après Paques une vie ressuscitée. Pierre, qui avait trahi, Paul qui avait persécuté, ont été transformés en apôtres courageux.
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Il y a enfin la vitalité́ de l’Église : sa croissance, son témoignage donné au monde sont des signes forts de la présence du ressuscité. Et c’est cela, au fond, la meilleure preuve de la résurrection. Nous cherchons parfois à l’extérieur des preuves de la résurrection quand la preuve, c’est nous. Il n’y a pas de preuves de la résurrection en dehors de celles qu'elle produit en nous, les mêmes qu'elle a produites chez ces premiers témoins, celles d'une foi retrouvée en la vie, avec le désir d’inscrire concrètement cette vitalité dans une manière d'aimer la vie, de la choisir, de la perdre et même de la quitter. Les signes de la résurrection, en définitive, ce sont les fruits qu'elle produit en nous.
La joie de Pâques resplendit cette année encore sur le visage de ces milliers de jeunes et d’adultes qui ont été baptisés en France au cours de la sainte Vigile. Elle illumine le témoignage de ces milliers de chrétiens que l’Esprit pousse aux périphéries de l’existence pour porter la Bonne Nouvelle à tous. Elle peut irradier notre propre vie de croyant si nous ouvrons nos cœurs à son impérissable nouveauté.
Encore une fois, mes amis, seul l’amour triomphe de la mort. N’attendons donc pas davantage pour nous mettre à aimer. Levons-nous ! Arrachons-nous à la torpeur de nos égoïsmes ! Soyons semeurs de vie nouvelle en aimant tous les hommes comme des frères ! Qu’il en soit ainsi.
Amen."
Thierry Scherrer - Évêque de Perpignan-Elne














