Dimanche 27 mars, Monseigneur Norbert Turini Évêque de Perpignan Elne, a ordonné prêtre pour son diocèse, Damien de Ricard. Le tout jeune ministre sacerdotal officiera désormais comme vicaire dans la communauté de paroisses Saint Ferréol du Bas Vallespir au côté du père Etienne Lafaye. Monseigneur David Macaire archevêque de Saint Pierre et Fort de France et Monseigneur Raymond Centène étaient également présents lors de cette ordination.

HOMELIE DU PERE EVEQUE ORDINATION SACERDOTALE DE DAMIEN DE RICARD DIMANCHE 27 JUIN 2021 CATHEDRALE ST JEAN-BAPTISTE DE PERPIGNAN

  Sœurs et Frères, L’ordination sacerdotale de Damien est un don que le Seigneur fait à notre Eglise diocésaine. Elle est aussi la réponse du Seigneur à notre prière pour les vocations, en écho à la demande de Jésus : « Priez le Maître de la Moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson ».

Nous en voyons les fruits et nous les verrons encore, espérons-le, avec l’ordination, si Dieu veut, de deux diacres en vue du sacerdoce l’année prochaine. Continuons donc à prier pour toutes les vocations dont l’Eglise a besoin pour sa vie et pour sa mission dans le monde. Une chose est sûre : le Seigneur appelle qui il veut. Il n’y a qu’à ouvrir l’Evangile pour nous en convaincre. Les Apôtres sont un choix libre de Jésus dans sa prière. Si j’avais été à sa place, ce qui est présomptueux, j’en conviens, je ne pense pas que j’aurai choisi les mêmes. Peut-être aurais-je même été plus sélectif que Lui, dans le choix des Douze.

Et oui, Jésus n’a pas appelé des « top modèles », parfaits en tout point, comme ceux qui font rêver les midinettes dans les magazines. Il n’a pas dit : « Je ne prends que les meilleurs pour me suivre, les autres, rentrez chez vous ». Il n’y a pas eu d’entretien d’embauche. Il n’a pas exigé au départ la perfection, mais en les enseignant, en les envoyant en mission, il les a formés à devenir parfaits comme notre Père céleste est parfait. La perfection est un chemin à parcourir, c’est le travail de toute une vie que d’atteindre la perfection dans l’AMOUR. C’est un très long chemin qui se parcourt jour après jour avec des hauts et des bas, avec nos faiblesses et nos forces, les grâces reçues et notre péché.

  • C’est un chemin de salut qui ne s’apparente pas à une forme de stoïcisme, mais à la voie de la sainteté.
  • C’est sur cette voie que tu chemines Damien, pas tout seul, mais porté par la prière du Peuple de Dieu et par le témoignage de sa foi qui nous évangélise, nous ses pasteurs et nous rend meilleurs.
  • C’est sur cette voie que le Seigneur te formera à sa perfection. Lui seul a ce pouvoir, nous, nous sommes à Son école jusqu’au bout de la route, ce n’est jamais fini.

Alors, sœurs et frères, je suis désolé pour vous, mais je n’ordonne pas un prêtre parfait et il le sait. Si vous rêvez du prêtre parfait, comme les belles-mères du gendre idéal, il n’existe pas, pas plus que d’évêque ou de pape parfaits. Non. Le seul prêtre parfait, c’est Jésus : « le Fils de Dieu, par excellence » comme l’affirme l’épître aux Hébreux. Nous ne sommes donc pas appelés à jouer au « Grand Prêtre » et à nous imposer en tant que tel au-dessus des autres. Mais, par l’ordination, nous participons au sacerdoce du Christ, le seul Grand Prêtre, ce n’est pas pareil. On ne se fait pas prêtre à la force du poignet, comme on se dessine un plan de carrière, mais nous le sommes sous la dépendance du Christ au service de Son Eglise et de Son Peuple. Cette participation au sacerdoce du Christ est très libérante, elle appelle à l’humilité et nous situe et resitue à notre vraie place à la suite de Jésus qui jusqu’après sa Résurrection continuera à dire à Pierre : « Suis-moi ». Jusqu’à la fin de ta vie Damien, si tes oreilles et ton cœur restent ouverts, Jésus ne cessera de te dire : « Suis-moi » et tu seras heureux de le faire. C’est quand on n’entend plus cet appel que les choses se gâtent parce que si l’on s’éloigne du Christ, que l’on n’écoute plus son appel, alors, on s’éloigne de son Peuple, de Son Eglise. Nous ne sommes plus dans cette proximité d’amour qu’Il attend de nous et qui est consécutive l’appel qu’Il nous adresse et par lequel, il nous unit à lui et aux autres.

Le risque, c’est toujours de s’auto-référencer, comme le dénonce vigoureusement le Pape François. Dans ce cas, on reste au sommet de sa vague et on regarde de haut ceux qui sont dans le creux. Récemment, le Pape François à Rome s’adressait aux prêtres de St Louis des Français et leur disait : « les prêtres « surhommes » tournent mal ». C’est vrai que tout ce qui est rare est cher, et comme les prêtres sont moins nombreux, cela pourrait être une tentation. En tout cas, elle n’a jamais été celle du Christ Grand-Prêtre, Lui qui donne sa vie pour ses brebis et qui t’appelle à donner la tienne totalement et par amour, dans son sillage, cher Damien, en prenant soin de son troupeau. Une de nos préoccupations comme pasteur, c’est d’associer des laïcs à notre mission, mais aussi de veiller dans le même temps

  • à ne pas les épuiser,
  • à ne pas leur en demander trop au risque de les décourager,
  • à trouver ensemble la juste mesure.

Nous n’avons pas non plus à soigner une image de marque, laissons cela aux stars du showbiz. Fions-nous plutôt à la parole de St Paul dans sa seconde lettre aux Corinthiens : « Et nous tous à visage découvert, nous reflétons la gloire du Seigneur ». Si les gens oublient ton visage et le mien parce que les pasteurs changent dans leur vie, ils n’oublieront jamais le visage du Christ que tu leur as révélé,

  • qui a touché leur cœur,
  • qui les a transformé et converti,
  • qui a donné un sens à leur vie, dans les yeux duquel ils ont vu la vie éternelle et y ont pris goût.

Ils ne te remercieront jamais assez

  • de leur avoir fait connaître le Seigneur,
  • d’avoir contribué à le faire entrer dans leur existence.

C’est cela qui est essentiel. Mais à une condition, que ta vie colle toujours à la sienne

  • dans la prière,
  • dans la fidélité,
  • dans ton union permanente de personne à personne avec Lui,
  • dans l’oraison et la contemplation.

D’ailleurs en célébrant l’eucharistie, tu ne feras rien d’autre que de faire entendre la Parole du Seigneur, et de le montrer présent, réellement dans le pain et le vin que tu consacreras et qui deviendront Son Corps, sa chair et Son Sang. Tu en vivras parce qu’il nourrira jour après jour ton sacerdoce. Par toi, Il sera présence réelle dans la vie de tes frères et soeurs qui viendront, comme toi, à la table du Seigneur, y puiser la force de mener une vie vraiment eucharistique. Jour après jour, tu auras à cœur d’annoncer, celui que tu contempleras à chaque fois que tu élèveras le Pain de la Vie et la coupe du Salut. Annoncer celui que nous contemplons, nous évite, le danger de nous annoncer nous-mêmes. Nous ne sommes que la voix, Lui est la Parole. Par notre voix nous la transmettons. Jean-Baptiste notre Saint Patron nous le rappelle dans cette Cathédrale. Refléter le visage du Christ, le contempler et l’offrir aux fidèles à la messe, être la voix de Sa Parole, c’est une bonne feuille de route, celle que te trace Jésus en ce jour où Il t’associe à Son Sacerdoce au service de Son Peuple vers lequel je t’envoie. C’est une histoire d’amour, une histoire d’alliance comme Jésus avec Son Eglise, comme l’évêque avec son diocèse, comme le prêtre avec sa communauté. Tu entres aujourd’hui dans cette alliance, uni à une famille diocésaine, à une famille paroissiale, à une fraternité sacerdotale, à une famille humaine. Quand j’ai commencé mon ministère de prêtre dans la pastorale des jeunes, il y a aujourd’hui 39 ans, je croyais naïvement que ce que je proposais, c’est ce qu’il fallait faire, puisque j’étais prêtre. Mais très vite les jeunes m’ont fait comprendre que je m’écoutais moi-même et que je ne les écoutais pas eux. Ils m’ont appris à écouter et à les écouter, à accueillir leurs idées et leurs projets. J’ai compris que l’Esprit Saint parlait en eux, pas qu’en moi et, du coup j’étais prêtre, certes, mais ils m’apprenaient à le devenir chaque jour davantage. Je leur dois beaucoup et je rends grâce au Seigneur pour eux. Il est certain que nous sommes appelés à former le Peuple de Dieu, à l’enseigner, mais aussi à nous laisser former par Lui. C’est ce qu’il y a parfois de difficile dans l’Eglise : considérer que les laïcs ne sont pas que les exécutants de ce que nous leur demandons et oublier qu’ils sont aussi nos formateurs comme nous le sommes pour eux, grâce à nos années d’études. Le reconnaître, nous libère et nous fait grandir. On parle beaucoup de synodalité aujourd’hui, mais elle se vit dans cette communion qui n’efface pas l’identité des uns et des autres, ou la responsabilité des uns et des autres, mais qui aide chacun à devenir ce pour quoi et pour qui il a été appelé par son baptême ou son ordination : un disciple du Christ choisi pour annoncer la Bonne Nouvelle à toute la création. Et cela on le vit ensemble. Damien, par l’imposition de mes mains, en présence de Monseigneur David, je vais t’ordonner prêtre diocésain, pas seulement prêtre, mais prêtre diocésain. C’est pour cela que tous tes frères prêtres viendront à leur tour t’imposer les mains, pour que tu sois rempli d’Esprit Saint, certes, mais aussi pour marquer ton entrée dans la fraternité sacerdotale qui vous unit entre vous et qui vous unit à moi dans le Seigneur : le presbyterium diocésain. Cette fraternité n’est pas que de pure forme, elle est nécessaire à la mission, à la vie de notre Eglise diocésaine. Tu deviens prêtre de cette Eglise, ouverte et accueillantes à tous, soucieuse d’aller vers tous, où comme en famille, chacune et chacun a sa place autour de la table familiale. Une Eglise où personne n’est oubliés et surtout les plus fragiles, les blessés de la vie et les plus pauvres à qui tu voues, Damien une attention particulière avec tes frères diacres permanents. Tu disposes de deux appuis solides, Pierre et Paul les deux colonnes de l’Eglise. Pierre, le premier à confesser la foi, il est le roc sur lequel Jésus bâtit Son Eglise Paul c’est la route, celle de la mission qui a permis que « l’Evangile s’accomplisse jusqu’au bout et que toutes les nations l’entendent ». C’est à eux particulièrement à l’approche de leur fête ou beaucoup de prêtres et diacres célèbrent l’anniversaire de leur ordination, que je confie ton ministère. Ma conclusion sera la même que celle que je t’adressais au terme de ma réponse à ta demande d’ordination : « Que Marie et Joseph t’entourent de toute leur tendresse et que leur intercession t’obtienne toutes les grâces du sacerdoce qui feront de toi un prêtre heureux, rempli de zèle missionnaire, témoin de la miséricorde, prompt à partager à tous la paix, la joie, l’Espérance et la vie du Ressuscité ».

AMEN.